Le jour où… mon patient s’est rompu le ligament croisé des deux jambes

Une rééducation concernant une rupture de ligament croisé n’est pas toujours chose aisée, mais qu’en est-il lorsque les deux jambes sont touchées ? C’est le cas atypique auquel j’ai dû me confronter, et qui impose certaines précautions. 

 

Deux skis, un saut… et deux ligaments

L’histoire a débuté de manière, disons, banale. Je sortais d’une consultation, et j‘ai vu dans la salle d’attente un patient avec des béquilles dont on ne pouvait pas dire que la mine était bonne… Durant le bilan qui a suivi, j’ai découvert qu’il s’agissait d’un patient très actif professionnellement et fan de ski. Il avait pour habitude de rester longtemps en station, pendant la saison d’hiver. 

 

Quelques jours avant notre rencontre, il avait été victime d’un accident en rentrant de sa journée de ski : il s’était réceptionné sur un ski sur un saut et avait entendu un bruit dans le genou, puis s’était réceptionné sur l’autre ski en ressentant la même sensation avant de tomber… Diagnostic, validé avant même qu’il commence sa rééducation : rupture du ligament croisé antérieur, à droite ET à gauche. Pour ce genre de problème, nous nous aidons généralement du genou qui n’a pas été lésé pour compenser l’impotence fonctionnelle… Cette fois, il a donc fallu s’adapter.

 

Deux opérations, deux personnes investies

La stratégie chirurgicale, elle, était déjà déterminée par le chirurgien. Le patient se faisait d’abord opérer du premier genou, puis du deuxième trois mois après si tout allait bien. Je le voyais en amont de chirurgie pour faciliter les suites post-opératoires, cette rééducation étant très souvent préconisée par les chirurgiens car elle aide à récupérer un genou fonctionnel et optimal avant la chirurgie. De plus, cela permet de communiquer sur l’état post-opératoire du patient. Ce qui n’est pas toujours fait et qui peut être violent, s’il n’est pas averti.

 

De par son profil et sa volonté de retourner skier au plus vite, l’adhérence au traitement s’est faite très rapidement. En raison de sa pathologie bilatérale exceptionnelle, nous nous sommes vus de nombreuses fois. Cet échange régulier, avec une évolution très favorable, sert à simplifier la communication. Cependant, il était important de ne pas créer de routine afin de continuer à progresser efficacement et d’essayer de toujours challenger le patient (ainsi que moi-même) tout au long de la rééducation. Pour cela, et afin d’avoir un œil extérieur, je l’ai régulièrement fait consulter par un collègue. 

 

Patience et évolution positive

À terme, l’objectif était que le patient puisse retourner au ski sans avoir à douter de ses genoux. Aux dernières nouvelles, il a passé plusieurs hivers sans encombre (avec, de temps en temps, des petites sensations après de grosses journées). Mais les genoux sont fonctionnels, et il n’a connu aucun épisode malheureux. Néanmoins, il a pu avoir la sensation de repartir à zéro durant le premier trimestre à cause des deux chirurgies qui se sont enchaînées à trois mois d’intervalle.

 

Si ce genre de chirurgie est très fréquente en France, les situations post-opératoires ne sont pas toujours simples à gérer à court terme pour le patient. Cette situation fonctionnelle compliquée est parfois mal vécue, surtout s’il n’a pas été prévenu en amont. L’autre frustration est venue du fait qu’il était compliqué de progresser sur le premier genou opéré lorsque le deuxième venait d’être opéré, en raison des restrictions post-opératoires. 

 

Et si le même type de patient revenait ?

Pour résumer, voilà les conseils que je donnerais à un kiné qui devrait faire face à ce genre de rééducation très rare :

  • avertir le patient, non seulement pour qu’il puisse anticiper son planning et réserver ses séances sur Doctolib mais aussi pour qu’il prenne conscience du délai incompressible de rééducation ainsi que de l’investissement que cette rééducation réclame ; 
  • ne pas minimiser cette chirurgie qui reste compliquée à vivre bien que beaucoup pratiquée, la communication et la rééducation pré-opératoire restant essentielles afin de faciliter le travail post-opératoire ;
  • lutter contre la routine malgré la répétition, sachant que nous allons beaucoup voir le patient, et ne pas hésiter à faire intervenir des intervenants ou des avis extérieurs de façon régulière pour toujours tirer le maximum de chaque séance ;
  • échanger avec les autres professionnels de santé, en l'occurrence avec le chirurgien pour s’assurer de l’évolution de ce cas atypique.

 

Globalement, cette rééducation s’est bien déroulée. Avec le recul et si un cas similaire m’était aujourd’hui proposé, je communiquerais sans doute davantage sur l’état post-opératoire du patient. 

 

Comme moi, rejoignez les membres co-constructeurs du programme Kiné Lab.
Avec Kiné Lab, programme de co-construction du logiciel de demain, retrouvez de nombreux témoignages de kinés et participez à la conception d’une solution numérique adaptée : https://info.doctolib.fr/kinelab/

 

3 « J'aime »